Un beau matin on se réveille et on se dit dit que l’on en a marre d’avoir les mêmes meubles que les autres, les mêmes assiettes et les mêmes miroirs de salle de bain. On boit tous notre café dans des tasses achetées aux mêmes endroits. On se dit tous que ce soir on se couchera plus tôt mais on trouve toujours quelque chose de « génial » à regarder sur internet. A force de râler tout seul devant sa glace le matin, il se fit la promesse de changer les choses. Acheter des objets pour chez soi, oui. Vivre dans un catalogue, plus jamais de la vie.

Après avoir regardé autour de lui, il grimaça de dépit. Il fallait se rendre à l’évidence. Pendant toutes ces années il avait voulu suivre les tendances, les modes et les conseils des youtubers spécialistes de la décorations. Tour à tour, son appartement avait pris des pseudos apparences de loft new yorkais puis de minimalisme asiatique mélangé à des matériaux « earth friendly ». Mais c’était décidé, ça allait changer. Il se fit la promesse de trouver, aujourd’hui, un objet différent, que l’on aurait vu sur aucun catalogue, aucune affiche et dans aucune vidéo de ces gourous du bon goût.

Il se rappela alors avoir vu dans la rue Dreyfus des magasins d’occasion ou d’artisanat local. Il se dit alors que ce serait une bonne idée d’aller y jeter un œil. Comme il faisait beau, il décida de se passer du 129 et prit donc la direction du sud. Après un bon quart d’heure, on le vit tourner dans la rue piétonne en face de la cité de l’espoir. Il marchait, le sourire aux lèvres grâce à la musique qu’il écoutait avec son Ipod. Il était heureux également d’essayer de changer son environnement. Il avait l’impression de partir à la chasse au trésor, lui qui manquait parfois d’aventures.

Arrivé à la fontaine, il fut comme attiré par les petites boutiques sur la droite. Il remonta la rue menant aux barrières en fer. De grandes portes en bois étaient ouvertes. Il leva les yeux au ciel. Le bâtiment était vraiment magnifique avec des couleurs bizarres. Du rouge, du jaune. De dehors on voyait tout un tas d’objets anciens. Des antiquités. Il hésita un moment à entrer. Après tout qu’avait-il à perdre ? Au pire, il ne trouverait rien et irait voir ailleurs.

Il entra.

A l’intérieur, il trouva des tas de meubles, des armoires, des vases, des disques, des vieilles valises. Il trouva difficilement son chemin. Au détour d’une allée, une dame le salua chaleureusement. Il lui répondit de la même façon, comme le font souvent les gens de la ville.

« Rien de particulier, je regarde,  je cherche ….. merci beaucoup« .

Après plusieurs minutes de recherche, il pensa ne rien trouver dans cette étrange boutique. Il s’apprêtait à sortir lorsqu’un objet attira son attention. C’était un vieux réveil. Il n’était pas spécialement beau mais il avait un certain charme. Il changeait des horloges faussement vintage que l’on trouve chez Ikea. Il se décida à aller voir la vendeuse. Il paya et rentra chez lui de suite.

Une fois arrivé dans le haut de la ville, il monta quatre à quatre les cinq étages. Il entra dans son salon et posa le réveil sur la table. Il devait choisir maintenant un emplacement pour son nouvel achat. Il était surtout content d’avoir commencé à changer certaines choses de son environnement. Il s’assit et commença à ouvrir la machine. Bien que l’objet semblait extrêmement ancien, l’intérieur semblait comme neuf à sa grande surprise.

Il tourna les clés du mécanisme au hasard jusqu’à comprendre comment on pouvait remonter le mécanisme. Le réveil se remit en route. Il faisait un bruit régulier, sec et métallique. Il fut surpris par le volume du mécanisme. Il comprit rapidement qu’il ne pourrait dormir avec un tel boucan. Il décida de le laisser dans le salon. Avant de sortir faire des courses, il essaya de régler la sonnerie pour tester le fonctionnement. Le réveil se mit comme prévu à sonner une minute après avoir été programmé. Celui-ci n’était pas uniquement fait pour réveiller les vivants. Il pouvait aisément le faire avec  les morts et bien plus encore. Il l’arrêta en tapant sur un des boutons sur le dessus. Il programma la prochaine furie pour le lendemain matin. Désormais il décida de ne plus utiliser son portable maintenant qu’il avait un objet spécialement dédié à la fonction de réveil. Le soir, il alla se coucher en pensant au lendemain. Il avait hâte d’entendre la sonnerie. mais en même temps il craignait le son infernale qui se dégageait de l’objet. Il s’endormit tard cette nuit là.

Le lendemain, il se réveilla et se leva de suite. Il regarda son portable. Il n’était pas encore l’heure de se lever. Le réveil n’avait pas sonné encore. Plus que quelques minutes à attendre. Il s’assit à côté en face de lui dans le salon, la main prête à actionner le bouton d’arrêt. Il patienta encore quelques minutes. Il ne se passa rien. Il trouva cela bizarre. Il avait pourtant bien programmé la bonne heure hier. Il avait dû faire une mauvaise manipulation. Il essayera de le faire sonner demain matin. Il devait maintenant se presser pour se préparer à aller au travail. Il prit une douche rapidement. Au moment où il allait partir, un vacarme démoniaque se fit entendre. Surpris il leva la tête et reconnut le bruit du réveil. Il se précipita dans le salon pour l’éteindre. Celui-ci reprit son tic tac normal, comme si de rien n’était.

Le soir venu, il régla de la même façon l’heure du réveil du lendemain. Il partit se coucher. Au bout d’un quart d’heure, il commença à s’assoupir. Un bruit métallique et continu vint le réveiller en sursaut. Après quelques secondes de panique, il courut dans le salon pour stopper la bête. Comment avait-il fait une fois encore pour se tromper ? Il repartit se coucher. Non sans une certaine appréhension.

Comme la veille, il se réveilla en sursaut et courut jusqu’au salon. Encore une fois il était debout en avance, craignant sans doute la colère de la machine. Il attendit quelques minutes. Rien ne se passa. Toujours les mêmes bruits calmes et réguliers de l’horloge. Il attendit encore, puis se prépara à partir. Arrivé sur le pas de la porte, il se retourna. Il n’entendit aucune sonnerie.

Il passa la journée à essayer se comprendre. Il trouvait l’objet particulièrement fascinant. A l’intérieur c’était une mécanique magnifique qui semblait sortir des mains expertes d’un horloger. Il pensait à son réveil en sortant du travail, puis en étant compressé dans le bus remontant vers la Boissière. Il monta les marches de chez lui en courant. Puis il s’arrêta. Son cœur s’emballa. Malgré les quelques étages qu’il restait à parcourir, il entendit son réveil qui l’appelait. Il reprit sa course encore plus vite. Il ouvrit la porte et l’apaisa en posant sa main sur le mécanisme.

Le lendemain, puis plusieurs jours après, on lui laissa des messages sur son portable. Cela faisait plusieurs jours que l’on ne l’avait pas vu. Lui, pourtant, allait très bien. Il devait rester à la maison. Voilà tout.