Pour ce 19ème Regard nous découvrons celui de NICoLas OrAn sur les « Cités » ou  « Grands Ensembles » de notre ville de Montreuil qu’il a photographiés à partir de 2009 dans le cadre de ses études d’urbanisme.

Certains quartiers comme celui du Bel Air par exemple ont depuis été rénovés (lire le communiqué de presse ici).

Après la seconde guerre mondiale, l’afflux de populations de province et de l’étranger conduit à édifier des grands ensembles venant compléter le parc de HBM construit pendant l’entre-deux guerres.

La première vague est construite par l’OPHLM dans les années cinquante.

Ils sont, pour la plupart, édifiés sur le plateau, à l’emplacement d’anciens clos à pêchers comme le groupe Bel Air (1955-1959). Ensemble construit près de l’ancien domaine de Tillemont, dans un quartier autrefois maraîcher.  Le programme  comprend 566 logements répartis en huit bâtiments : 3 bâtiments de neuf étages (360 logements) et 5 bâtiments de quatre étages (200 logements). Les architectes sont Pierre Audra et Paul Marme (plans de septembre 1956).

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Bel Air sous la neige – Photo de Nicolas Oran

Le Clos-Français,  au nord de la Croix de Chavaux est construit entre 1956 et 1961, sur une ancienne zone de murs à pêches. C’est un programme de 569 logements construits par la SCIC. L’ensemble comprend sept bâtiments de 3 à 13 étages et 15 maisons individuelles, ainsi que des parkings, des espaces verts, des aires de jeux. Le Clos français s’appelait autrefois – autour de 1650 – le Clos Allemand  jusqu’aux années 1930 au moins. À cet endroit s’élevait le Moulin de l’épine. Une rue a porté ce nom jusqu’en 1928.

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Le Clos Français – Photo de Nicolas Oran

En 1961 est créée la SEMIMO B, société d’économie mixte de Montreuil, qui entreprend des programmes de construction. Les années soixante voient une importante vague de construction.

Jean Moulin (1963-1966), avec 240 logements.

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Jean Moulin – Photo de Nicolas Oran

C’est aussi la période de résorption de bidonvilles aux marges de la ville (la Noue).

La cité de La Noue est construite à partir de 1960 par Serge Lana et Serge Magnien (539 logements) ; la cité comprend un centre commercial, des espaces verts avec sculptures, une chapelle construite en 1971 par l’architecte Yves Carles en béton armé avec un mur en briques de Vaugirard (300 places). Le toponyme Noue pourrait venir du celtique Noa ou Noë, qui signifie terrain marécageux.

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La Noue : Montreuil/Bagnolet – 110 mètres de haut (R+32), plus haute tour d’habitation du 93 – Photo de Nicolas Oran

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La Noue – Photo de Nicolas Oran

Le groupe Montreau est construit sur une partie de l’emprise de l’ancien domaine de Montreau, en deux tranches, entre 1961 et 1967 (1200 logements) par Audra et Marme, puis agrandi en 1975 (130 logements supplémentaires) ; il comprend un centre commercial : la cité des Morillons.  Le quartier du Morillon tire son nom de plantations de ce type de vigne noire rustique recherchée pour sa précocité et cultivée dans les environs, de Fontenay à Bagnolet, au XIXe siècle.

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Les Morillons – Photo de Nicolas Oran

Léo Lagrange (1968) avec 84 logements, 1 commerce, 1 dispensaire ;

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Léo Lagrange – fait partie du quartier de la Boissière qui englobe une partie de Montreuil, Noisy le Sec et Rosny Sous Bois – Photo de Nicolas Oran

Dans les années soixante-dix sont construites des cités situées sur le plateau.

Théophile Sueur (1971) avec 259 logements, un commerce, une poste.

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Théophile Sueur – Photo de Nicolas Oran

Les Grands Pêchers (1977) avec près de 500 logements.

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Grands-Pêchers – Photo de Nicolas Oran

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Grands-Pêchers – Photo de Nicolas Oran

La cité des Ruffins (1975) avec 89 logements. Le nom Ruffins provient d’un labourage dit Bois Ruffin, qui d’après l’abbé Lebeuf, aurait été donné en 1224 par Olivier de la Roche à l’Abbaye Sainte-Geneviève de Paris.

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Les Ruffins – Photo de Nicolas Oran

Les opérations d’urbanisme menées par la ville autour de 1970 conduisent à la démolition de quartiers insalubres et à la reconstruction d’immeubles équipés du confort minimal :

La Croix de Chavaux, entre 1969 et 1974.

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Croix de Chavaux – Nicolas Oran

Dès les années quatre-vingt, d’importants programmes de reconstruction ou de réhabilitation (Bel-Air) sont mis en place.

Nicolas Oran  explique sa démarche et pourquoi il a choisi de prendre en photos les cités HLM du 93 dans un interview dont voici quelques extraits:

Etant étudiant en urbanisme, la photo me servait à la base d’illustration pour montrer aux gens les HLM dont je parlais dans mes exposés oraux. Il n’y avait aucune démarche artistique. Je voulais juste garder une trace des endroits que j’avais visités. Je pense que la photo est venue après  avec l’envie que j’avais de montrer aux gens ce que je voyais. La photo s’est donc imposée à moi comme un outil visuel. J’essaye aujourd’hui de faire plus attention au cadrage, à la qualité de la photo qu’auparavant.

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Béton armé à gauche et Balèze à droite – Deux photos de Nicolas Oran

Tout a réellement démarré pour un projet universitaire. Je devais choisir une zone et y montrer les aménagements entrepris, j’ai tout de suite pensé à Clichy-sous-Bois/Montfermeil et son projet ANRU le plus cher de France. La zone étant toute proche d’où je vivais et symbole des émeutes qui ont touché la France en 2005. C’est donc naturellement que je m’y suis rendu pour y prendre mes premières photos de grands ensembles… Je n’ai pas arrêté depuis. L’état de délabrement total de la zone m’a poussé à essayer de voir si les autres quartiers du 93 étaient dans le même état. Au fil de mes visites, je me suis rendu compte qu’heureusement, la plupart des cités HLM n’étaient pas sur le modèle des copropriétés délabrées de Clichy -sous-Bois/Montfermeil.

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Montreuil et HLM à HLM – Photos de Nicolas Oran

Je n’ai pas de réelle démarche, mais prendre des photos toujours plus loin me permet de découvrir des endroits encore inconnus et de les immortaliser. La découverte est sûrement la réelle motivation qui me pousse à toujours aller plus loin et découvrir de nouveaux quartiers, au-delà du 93.

On a toujours un doute sur l’utilité de ce que l’on fait, surtout lorsque l’on ne veut pas devenir photographe professionnel. Il m’arrive de me demander pourquoi je fait tout ça. Cette remise en question me pousse à photographier d’autres choses que les cités HLM (notamment des événements sportifs ou mes voyages). Malgré tout mon seul grand plaisir est de me rendre dans ces endroits difficiles ou faire une belle photo est toujours une aventure.


Je vous invite à visiter la galerie flickr de Nicolas : www.flickr.com/people/nicolasoran et y découvrir les facettes de nombreuses villes de banlieue, Bagnolet, Rosny, celles de villes lointaines, New York, de pays lointains l’Inde etc…

A bientôt pour un nouveau Regard sur Montreuil !